El adolescente abofeteado
Los mismos golpes que lo enviaron al suelo lo lanzaron al mismo tiempo lejos por delante de su vida, hacia los años futuros donde, cuando sangrara, ya no sería a causa de la iniquidad de uno solo. Como el arbusto al que sus raíces reconfortan y que aprieta sus ramas amarillas contra su fuste resistente, descendía después retrocediendo en el mutismo de ese saber y en su inocencia. Por último, escapaba, desaparecía y se volvía soberanamente feliz. Ganaba la pradera y el cerco de cañas cuyo limo acariciaba y cuyo seco estremecimiento percibía. Era como si lo más noble y perseverante de cuanto la tierra había producido lo hubiera, en compensación, adoptado.
Volvería a ser así hasta el momento en que, la necesidad de romper desaparecida, se mantendría erguido y atento entre los hombres, a la vez más vulnerable y más fuerte.
L’Adolescent souffleté // Les mêmes coups qui l’envoyaient au sol le lançaient en même temps loin devant sa vie, vers les futures années où, quand il saignerait, ce ne serait plus à cause de l’iniquité d’un seul. Tel l’arbuste que réconfortent ses racines et qui presse ses rameaux meurtris contre son fût résistant, il descendait ensuite à reculons dans le mutisme de ce savoir et dans son innocence. Enfin il s’échappait, s’enfuyait et devenait souverainement heureux. Il atteignait la prairie et la barrière des roseaux dont il cajolait la vase et percevait le sec frémissement. Il semblait que ce que la terre avait produit de plus noble et de plus persévérant, l’avait, en compensation, adopté.
// Il recommencerait ainsi jusqu’au moment où, la nécessité de rompre disparue, il se tiendrait droit et attentif parmi les hommes, à la fois plus vulnérable et plus fort.
René Char
ph:Torbjørn Rødland
